2008/12/12

Carnet

Violence et résignation

Le recours à la force policière et judiciaire dans l'exercice du pouvoir est un signe de faiblesse sinon de déclin, comme l'histoire l'a toujours démontré.

Lentement et sûrement, notre pays se construit un ordre social par la contraite et par son envers, la résignation.

Bien des faits récents montrent un Etat attiré par une représentation en puissance de son autorité: expulsions, délits d'outrage, procédures diverses, arrestations spectaculaires, intimidations, fichage, surveillance...
L'exécution est assurée par une main-d'oeuvre toujours plus dévouée. Big Brother veut tenir ses citoyens à l'oeil.

Et que font-ils, les citoyens?


Les victimes protestent, les gens de bon sens et de coeur les soutiennent et les plus nombreux laissent filer.
Et c'est là que le bât blesse.
On peut affirmer au risque de choquer que nous sommes tous coupables d'avoir, depuis de longues années, laisser nos relations sociales se dégrader.
Et, sans jouer les moralistes, on doit bien admettre que pas plus les règles élémentaires du "vivre ensemble" que l'autorité nécessaire à leur apprentissage ne nous importent réellement. D'où la délégation de pouvoir accordée à l'autorité publique, à l'école qui n'en peut mais, à l'Etat qui en demande toujours plus. Notre résignation a permis qu'au coeur de nos vies quotidiennes s'infiltre la violence. Il faut y ajouter la contamination par nos divertissements favoris.
Nos tendances primitives trouvent une satisfaction inépuisable dans les innombrables feuilletons et films avec meutres, cadavres ensanglantés, fusillades, assassins et justiciers. Ils nourrissent notre imaginaire collectif, si bien que cette violence paraît désormais ordinaire aux yeux d'un enfant. De là sont nés des modèles de héros musclés qu'il n'oubliera pas de sitôt, surtout s'il devient policier.
Ah, ces belles soirées flasques au fond d'un canapé devant un écran de feu et de fureur !
La résistance à toute forme d'oppression commence, on le sait, par ce qu'on exige de soi.
Ne rien céder.

Fabienne Pascaud in Télérama 3074 du 10 décembre 2008

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